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Julien Fournié, cartésien de la Haute Couture

C'est toujours un grand privilège de rencontrer un créateur seulement quelques jours avant la présentation de sa collection. Surtout lorsqu'il s'agit de découvrir ses pièces Haute Couture en avant première. Julien Fournié travaille et reçoit chez lui à Paris, préparant la première collection Haute Couture qui portera son nom. Stressé ? Pas vraiment. Ou alors il cache bien son jeu, derrière cet air extrêmement apaisé qu'il affiche tout le long de l'interview. Le challenge et la pression sont pourtant là. Après avoir travaillé chez Givenchy , Jean-Paul Gaultier ou encore Torrente , Julien Fournié lance sa propre maison et défilera le 7 juillet à Paris, à l'occasion de la semaine de la Haute Couture. Rencontre et débat sur la vulnérabilité de la femme, maître mot de sa collection.

 

Mélody Kandyoti : Vous sentez-vous nerveux ?

Julien Fournié : Zero Stress. Je ne travaille pas du tout comme ça. Je suis hyper cartésien, tout est "under control". Même si on se laisse la chance d'avoir des modèles évolutifs, des choses qui ne sont pas vraiment cernées par les croquis, je suis toujours dans un rétro planning qui pare à tout problème éventuel. Et là tout s'est très bien emboîté, et je suis vraiment très content.

Quelles ont été vos sources d'inspiration pour cette collection ?

La femme. Cela paraît bateau dit comme ça, mais il ne s'agit pas de la femme comme on l'entend en ce moment, c'est-à-dire la femme forte etc. J'ai préféré l'option de la vulnérabilité de la femme, sa fragilité. La collection est entièrement basée sur cette idée. J'ai commencé par faire médecine avant la mode, et j'ai une obsession pour le grain de peau. La collection est donc basée sur les trompe-l'oeil, où commencent et s'arrêtent les vêtements, où commence et s'arrête la peau. j'ai voulu créer des fenêtres ouvertes sur le corps. Je pense que le nouveau luxe est justement de montrer qu'on est vulnérable. Est-ce que le luxe ne pourrait pas être le fait d'être presque nu, sans scorie, vous savez cette technique au théâtre et au cinéma qui consiste à ne pas "jouer". J'ai vraiment envie de projeter cette image là sur les femmes qui porteront ma collection. Il s'agit d'aller chercher tout ce qui la rend vulnérable et plus belle. Je trouve parfois qu'un petit bouton chez une femme va révéler son entière beauté. Une petite cicatrice ou parfois un sourcil pas très bien épilé.

Vous n'êtes pas à la recherche de la beauté parfaite ?

C'est inintéressant. C'est fini pour moi. Ca n'existe plus les filles parfaites, on n'en veut pas. En tout cas moi, je n'en veux pas! Je trouve au contraire, qu'une femme est jolie quand elle a une rondeur. La Haute Couture pour moi, c'est être un peu chirurgien esthétique. Des femmes arrivent parfois avec une épaule plus basse que l'autre, un sein retouché... Je pense que nous sommes là pour monter un bras, cacher une épaule... Je veux les aider à être mieux dans leur corps, et non pas qu'elles deviennent un porte-drapeau de ce que je suis. Je veux que chaque femme trouve son intégration dans cette robe qu'elle va me commander. C'est très important. Chez Torrente, j'ai connu la folie de ruché, de broderies, de maquillage et de coiffures, dans un univers fantasmagorique. J'ai adoré travailler pour Jean-Paul Gaultier ou Alexander McQueen chez Givenchy, ces expériences m'ont beaucoup rempli. Mais tout d'un coup, je me suis demandé "qu'est-ce qui te définit à l'heure actuelle ?". Et je pense que c'est le fait d'être vulnérable moi aussi. Dans la mode il faut toujours avoir une image très dure, parfaite, très léchée, et je pense que l'on fait fausse route. Cela ne convient pas du tout au monde actuel.

Mais les clientes aisées qui achètent des pièces Haute Couture n'attendent pas justement d'être "parfaites" ?

J'ai la chance d'avoir quelques clientes qui me suivent. Des femmes de tous les âges, qui en ont assez d'être des porte-flambeau. Elles ont envie de se définir elles-mêmes. L'histoire, c'est de trouver le bon équilibre entre "ce que je suis, ce que je veux montrer, et me faire plaisir". Je ne suis pas là pour leur dire que j'ai la solution, mais pour leur donner des clefs. Cette collection est très féminine, mais également facile à porter.


Par rapport à cette démarche, comment avez-vous choisi vos mannequins ?

J'ai pris des femmes qui ne sont pas toutes dans un moule. Elles ne sont pas toutes mannequin, mais ont quand même cette élégance qui fait qu'elles peuvent défiler sur un podium. Des jeunes filles qui viennent d'arriver à Paris par exemple, et dont on dit qu'elles sont trop fragiles pour défiler. Moi ce que j'aime, c'est justement le faux pas, l'imperfection, le fait de ne pas être parfaite. J'essaie évidemment d'être dans une certaine balance.


Vous vous rendez compte que cette démarche peut se heurter à une vision selon laquelle, la Haute Couture est faite pour rêver ?

J'espère que ma collection fera rêver. Avec une proposition qui correspond plus à notre époque. Je ne prétends pas non plus révolutionner la mode, mais je pense que je vais travailler de plus en plus vers cette démarche. Je ne suis entouré que de femmes, jolies ou moins jolies, âgées ou très jeunes. L'idée, c'est de redonner sa place à la femme qui veut se plaire à elle-même et qui n'a pas peur de ses faiblesses.

Si une femme pouvait incarner cette vulnérabilité, à qui penseriez-vous?

Une femme dans la rue. On veut évidement tous habiller les stars pour acquérir une certaine notoriété, c'est important. Je suis le premier à rêver d'habiller une femme comme Tilda Swinton ou Anne Hatthaway. Mais j'aime avant tout les beautés atypiques.

A votre avis, comment allez-vous vous sentir juste avant que le premier mannequin ne sorte sur le podium?

Calme, enthousiaste, bien. J'ai travaillé dans plusieurs maisons, et c'est la première fois, que je me sens en adéquation avec ce que je fais. Peut-être que je suis une tête brûlée, mais cette collection me correspond, c'est ce que je suis. Les gens vont adhérer ou pas. Si critiques il y a, il faudra les prendre en compte, réfléchir, sans forcément changer son propos, mais l'adapter pour qu'il soit mieux compris d'une certaine manière. Mais je me sens vraiment bien.

 

Texte et propos recueillis par Mélody Kandyoti

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