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Cannes 2013 : interview de Vincent Darré pour "Opium", le film ovni d'Arielle Dombasle

Opium d'Arielle Dombasle fait partie de la sélection "Cannes Classics" et a été présenté le 23 mai au cours d'une soirée en hommage à Cocteau. Un film singulier, un film de copains, mais aussi une comédie musicale dont toutes les paroles ont été piochées dans les poèmes et les écrits de Cocteau.

Interview de Vincent Darré, directeur artistique d'Opium.

À quelle époque se passe le film ?
Cela se passe pendant les quatre ans de la relation amoureuse entre Cocteau et Radiguet, Radiguet a seize ans, Cocteau 20 ans de plus, ce sont les années 20.

Le film ne respecte pas précisément une chronologie c'est plutôt un hommage à Cocteau un peu délirant. La trame c'est l'histoire bien réelle entre Radiguet et Cocteau et puis Maurice Sachs débarque et vient se greffer dessus.

Pas de respect historique formel donc ?
On ne respecte pas forcement l'esthétique des années 20, nous n'avions pas que des costumes de cette époque et puisque Cocteau traverse tout un siècle, nous n'allions pas nous arrêter au respect pointilleux des costumes d'une époque. Ce film n'a rien d'une reconstitution, il est plutôt une évocation de sa vie, de son travail.

C'est l'esprit d'un film fait avec peu d'argent, à la façon dont Cocteau lui-même, a réalisé ses premiers films. Le plus joli hommage qu'on pouvait lui faire.

L'opium est-il très présent, les héros sont-ils très allongés ?
Effectivement ils sont pas mal allongés. Catherine Baba joue le rôle d'une tenancière de fumerie d'Opium, ses attitudes sont très "cinéma muet", elle porte ses propres costumes et des turbans de Paul Poiret. Dans cette fumerie Julie Depardieu joue la préparatrice des pipes à opium. Alors débutent des visions d'opiomane qui se mélangent à l'irréalité des rêves de Cocteau. C'est cela qui donne la fantaisie. Les délires se mélangent au réel et aux cures que subit Cocteau pour se désintoxiquer.

Les scènes d'extases et d'hallucinations ont-elle nécessité des effets spéciaux ?
Oui, mais des petits effets spéciaux à la Méliès, nous sommes partis sur des effets de cinéma comme Cocteau lui-même en réalisait dans ses films pour lesquels il inventait les trucages avec les moyens du bord. Nous, nous avons découpé des cartons, travaillé avec du fil de fer tout est fait de bric et de broc.

Vous avez pas mal utilisé le fil de fer blanc ?
Le fil de fer est très évocateur des dessins de Cocteau et assez juste pour rendre son trait qui ne lève jamais le crayon de la feuille. J'ai fait également réaliser de faux trompe-l'oeil pour les visions de rêve, souvent des scènes mythologiques tournées en noir et blanc.

Tu étais très jeune lorsque tu as découvert Cocteau ?
Chacun a son dieu ou son mythe, moi ça a toujours été Jean Cocteau, jeune je m'identifiais totalement : les cheveux, les vêtements, le T-shirt marin dans un grand pantalon en prince de galles ceinturé avec une corde, des espadrilles lacées. Élève au studio Berçot, à 17 ans, je rêvais de Cocteau. Ça m'est donc revenu très facilement.

Ton rôle dans ce film ?
Directeur artistique, un rôle au cinéma, qui a dû exister autrefois, mais qui n'existe plus aujourd'hui. A la fin, j'ai mis la main à la pâte, avec Fleur Demery, la chef costumière et Marine, mon assistante. Nous avons fabriqué les décors de toute la partie censée se passer à, Villefranche. Arielle a choisi transposer Villefranche à Tanger ce qui est très malin car on a tourné l'hôtel Welcome dans la Villa France, puis sur le port qui ressemble plus sûrement que la côte d'Azur actuelle, à l'image qu'on se fait de la côte d'Azur de l'époque. Nous y avons tourné les visions et les évocations mythologiques.

D'autres lieux de tournage à Paris ?
A Paris, Arielle Dombasle avait très envie d'une ambiance de cirque et je me suis souvenu de cet endroit démentiel qu'est le musée des Arts Forains. Nous avons pas mal tourné là- bas. C'est là aussi que nous avons imaginé le décor du Boeuf sur le Toit. Pour les scènes chez les Noailles, nous sommes allés chez Baccarat, et avons placé des tableaux, comme dans l'escalier des Noailles.

Mais tout cela encore tient de l'évocation plus que d'une copie de la réalité.

Aviez-vous besoin de l'aval de Pierre Bergé titulaire du droit moral sur l'oeuvre de Cocteau ?
Nous sommes allés voir Pierre au milieu du film pour lui de mander son aide. Lorsque je lui exposais cette idée d'évocation et non de copie historique, il était d'accord : Cela donne finalement une meilleure idée des choses, m'a-t-il dit.

Nous avons hésité à filmer chez Cocteau à Milly la Forêt et dans la villa Santo Sospir, car l'évocation était plus amusante que la vérité.

La musique participe-t-elle de cette volonté de légèreté ?
La musique de Philippe Eveno ajoute beaucoup au film. C'était au début, un projet de chansons sur les poèmes de Cocteau entre Arielle et Philippe Eveno. Puis Arielle a décidé de transformer le projet en comédie musicale. Les personnages chantent sur les textes de Cocteau qui parfois sont très énigmatiques. Après avoir fait toute une recherche sur la musique du groupe des 6 et sur Satie, Philippe en a tiré une composition moderne qui sonne un peu comme à l'époque. Entendre Julie Depardieu chanter des textes de Cocteau, c'est merveilleux !

Dans le film, ce sont toujours des mots de Cocteau ?
Pas une parole du film qui ne soit tirée de ses écrits. Arielle a fait toute une recherche sur les textes et les poèmes. Par exemple, dans dans la fête foraine, Anna Sigalévitch, la princesse de Polignac, se met à chanter sur un poème qui parle d'un Dimanche matin alors que tout le monde tourne en bicyclette. Farida apparaît comme une espèce d'Arletty, tenancière d'un bordel à Marseille, et soudain la voici entourée des marins qui chantent autour d'elle. Tout cela donne au projet la légèreté d'une comédie musicale.

Beaucoup de copains au casting du film ?
Tout a été très improvisé. Grégoire Colin est arrivé par le biais du chef opérateur Leo Hinstin, Arielle cherchait un Radiguet, et Josée Dayan, très forte pour les castings, avait repéré un jeune ayant travaillé avec Pina Bausch. C'est la qu'on a découvert Samuel Mercer, Incroyable lorsqu' il danse avec des gestes très "écorché".

Avec Arielle, nous rêvions de faire tourner Niels Schneider, un acteur québécois sublime qui jouait dans "Les amours imaginaires" de Xavier Dolan. Je me disais : c'est une bombe, un Louis Garrel blond. Il a accepté l'aventure, interprétant le rôle de Maurice Sachs qui vient se greffer comme un troisième séducteur. Il se sert de Cocteau, le séduit, devient son secrétaire, mais c'est un brigand une personnalité extrême, prête-à-tout.

Arielle Dombasle joue-t-elle?
Elle joue un personnage mythologique : Mnémosyne.
Cocteau était obsédé par les dieux grecs, alors il y a tout un parallèle qui se fait au cours des visions dues à l'Opium, toutes sont liées aux dieux grecs, à la fatalité, à la mort. Dans l'univers de Cocteau, il y a toujours la mort. Et dans ce film, c'est le jeune Radiguet qui va mourir.

Julie Depardieu et Philippe Katerine dansent ?
Julie habillée en Poiret devient une vision d'opium, elle était très angoissée pour sa scène de chant et de danse et je lui avais montré la danse de Marlène au serpent, quant à Philippe Katerine, il savait très bien comment dansait Nijinski. Quand ils dansent et bondissent, Julie et Philippe ont en eux quelque chose de magique. C'est une des scènes les plus étranges du film. En voyant Philippe Katerine en Nijinski, on rit, pourtant ça n'est pas une caricature, Philippe Katerine est vraiment un personnage poétique. Il ajoute à tout cela une espèce de modernité cubiste revue par notre époque. Il a cette culture... et d'ailleurs toutes ses chansons sont complètement dadaïstes.

L'idée du film de copains existe dans l'histoire cinéma.
Bien sûr, pendant La Nouvelle Vague, mais avant cela, Buñuel à ses débuts, Dali tournaient entre copains, parfois, à Hyères dans la villa des Noailles. C'est aussi par sa construction que ce film est un hommage.

Tout le monde a joué le jeu ?
Tous les acteurs on joué gratuitement seuls les techniciens ont été payés. Arielle a un pouvoir de conviction extraordinaire et j'ai découvert que cette femme, avec son air fragile, est vraiment convaincante. Elle sait exactement ce qu'elle veut et dirige une équipe technique de façon très exigeante. Son chef op, Léo Hintin qui était l'assistant de Caroline Champetier a fait une très belle lumière. Au montage encore elle a imposé que l'on conserve certaines scènes. Elle a été très présente pour la post production, et les trucages.

S'investir ainsi dans un film, sans rétribution, se fait sans problèmes ?
Au début je me suis dit : c'est une vraie galère, puis j'ai pensé : " qui donne encore de son temps a notre époque, pour quelque chose de totalement gratuit ? " Finalement, on s'en fout, c'est un projet joyeux et Oui, ça nous prend du temps et, comme dit Arielle : "ce seront de merveilleux souvenirs"...

Je ne l'aurai pas fait pour un autre sujet et puis j'ai toujours rêvé de faire metteur en scène ou quelque chose dans le cinéma. Alors, direction artistique, chapeauter l'esthétique, d'un film c'est un travail en proximité avec le metteur en scène qui me convenait parfaitement.

Propos recueillis par Paquita Paquin

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