"Un + une" le dernier film de Claude Lelouch est un long métrage sur le sujet que le réalisateur français maîtrise sans doute le mieux : l'amour. Un thème souvent évoqué mais dont les soubresauts lui offrent à chaque fois une nouvelle façon de le filmer, une nouvelle vision pour le raconter et de nouveaux acteurs pour insuffler une autre dynamique.

Antoine (Jean Dujardin) ressemble aux héros des films dont il compose la musique. Il a du charme, du succès, et traverse la vie avec autant d'humour que de légèreté. Lorsqu'il part en Inde travailler sur une version très originale de "Roméo et Juliette", il rencontre Anna (Elsa Zylberstein), une femme qui ne lui ressemble en rien, mais qui l'attire plus que tout. Ensemble, ils vont vivre une incroyable aventure...

L'Inde, un personnage incontournable

"Un + une" aurait-il eu autant de force et d'impact s'il avait été tourné ailleurs qu'en Inde ? On peut en douter tellement le pays prend une place aussi importante que les acteurs principaux. Les protagonistes de cette histoire d'amour, outre leurs propres sentiments ambivalents l'un pour l'autre dès leur rencontre, doivent aussi composer avec le foisonnement qui les entourent et qui apportent à chaque événement une atmosphère particulière. Les couleurs, les sons, la spiritualité, tout concoure à ce que les sens d'Antoine et d'Anna soient totalement en éveil car sollicités au maximum. L'Inde, véritable organisme vivant, fait fatalement évoluer les personnages dans des directions qu'ils ne pensaient pas forcément pas prendre. Le pays, ses habitants, ses coutumes vont les mener vers des voies, des pensées dont ils n'avaient pas idée. Visuellement aussi, l'Inde offre un cadre exceptionnel : les couleurs explosent, la vie grouille, on a à la fois l'impression que tout va très vite et que tout est très lent. Tout cela participe également à la construction de l'histoire entre Anna et Antoine. Sans l'Inde, leur rencontre aurait certainement été plus simple. C'est le sous-continent qui lui donne autant de force et qui exacerbe les sensations et les sentiments. C'est l'ensemble qui rend le film bien plus fort.

"Une canaille et une femme qui veut s'encanailler"

Du coup, le cadre narratif est somptueux pour un sujet vieux comme le monde et souvent traité au cinéma : la rencontre entre un homme et une femme et l'amour naissant. Sauf que là, Anna, femme de l'ambassadeur de France en Inde part en pèlerinage vers le Gange car elle n'arrive pas à avoir d'enfants. Nourri de spiritualité locale, elle cherche une solution et décide de s'en remettre aux dieux, comme tous les Indiens... Sur un coup de tête, dans tous les sens du terme, Antoine la suit. Au fil d'incessantes heures de train, de bateau, de marche, chacun se découvre et se livre. Le voyage offrant ainsi des possibilités romanesques infinies, d'autant plus que les personnages ne se ressemblent pas et que tout pourraient les opposer. C'est Jean Dujardin qui résume peut-être le mieux la situation pour nos confrères d'Allociné : "c'est une canaille et une femme qui veut s'encanailler". Ce voyage est aussi un parcours initiatique. Anna est empreinte de spiritualité alors qu'Antoine ne croit en rien, mais va pourtant se découvre une âme et des sentiments qu'il ne soupçonne pas forcément. Alors, même si tout a été dit ou presque sur l'amour et qu'il est souvent difficile de se différencier du tout-venant, Claude Lelouch réussit à filmer une histoire sensible avec une Elsa Zylberstein à fleur de peau et un Jean Dujardin qui cabotine et apporte légèreté et respiration au film grâce à son humour et sa bonne humeur.

Grégory Curot