Ringarde, l'eau de Cologne ? Que nenni ! Dans un univers de la parfumerie qui fait la part belle aux fragrances de plus en plus vives et légères, elle occupe une place de choix et affiche une longévité inégalée. Car saviez-vous que la dame est centenaire ? Elle a officiellement vu le jour au début du 18e siècle à Cologne, en Italie. C'est là-bas que ce mélange d'hydrolat et d'alcool a été créé. En 1708, Jean Marie Farina, distillateur, commercialise son "Eau admirable", fruit de la rencontre entre les extraits de plantes et l'eau de vie. A contre-courant des parfums capiteux qui avaient alors le vent en poupe, il imagine une eau parfumée ne contenant que 4 à 6% d'essences, là où le parfum en contient au moins 20%. Le résultat, frais et délicat, rencontre rapidement un vif succès jusqu'à la cour de France.

Louis XV puis Louis XVI en deviennent des adeptes, consommant à profusion cette eau aux prétendus bienfaits médicinaux (un simple argument de vente). Devenu un incontournable de la toilette, il s'offre déjà des déclinaisons. Ainsi, la maison Guerlain en développe un spécialement pour l'impératrice Eugénie, baptisé Eau Impériale, en 1853. Quelques années plus tard, c'est la maison Roger Gallet qui se dit dépositaire de la recette originale, conservée jusqu'à aujourd'hui.

Une eau de Cologne dans l'air du temps

Quel est donc le secret de la Cologne pour se maintenir ainsi dans nos vanity ? Ce qui en fait un objet à part et intemporel à la fois, c'est cette fraîcheur. Prisée du monde de la haute, elle est devenue un objet de masse, commercialisée par des marques plus abordables, lui ouvrant la porte de toutes les salles de bain. Mais loin de verser dans le simple produit usager, elle a su se maintenir dans cette entre-deux, développée par Hermès, Dior, Chanel et Bulgari, et disponible en grande surface.

Mieux, elle est revenue en force, forte de son image de produit simple et vrai. Loin de s'être démodée, elle se décline désormais en format nomade (chez le Couvent des Minimes) et se refait une beauté chez l'Atelier Cologne, qui se plaît à en offrir de multiples variantes. Sans compter que dans un univers des cosmétiques où l'unisexe se fait de plus en plus présent, l'eau de Cologne fait office de précurseur. "La seule fois où la parfumerie - qui fonctionne à la traîne, a été en avance, c'est avec l'eau de Cologne", expliquait Francis Kurkdjian, nez d'Élie Saab et créateur du Mâle de Jean Paul Gaultier, à Puretrend. "Il y a 400 ans, on a créé le produit transgenre par excellence". Et si c'était ça, le vrai secret de son succès ?

C.B.