Yves Saint Laurent a eu son biopic, Gianni Versace aura enfin le sien. De ses débuts fulgurants à sa mort dramatique, Bille August souhaite faire de la vie du créateur une oeuvre cinématographique. Seul problème, le clan Versace parle déjà de "fiction totale". Si Pierre Bergé avait accepté de participer entièrement au "Saint Laurent" de Jalil Lespert, Donatella a d'ores et déjà mis son veto. Liberté d'expression oblige, le film se fera quand même. Mais à quel prix ?

Antonio Banderas, un choix à double tranchant

Le moins que l'on puisse dire, c'est que le choix d'Antonio Banderas pour porter ce long métrage est surprenant. En perte de vitesse depuis plusieurs années, l'acteur peine à trouver le rôle de sa vie. Et pourtant, tant d'espoir avait été placé sur l'Espagnol. En 1994, lorsqu'il débarque sur nos écrans dans le rôle du fiancé de Tom Hanks dans l'excellent "Philadelphia", on se dit qu'il représente le renouveau d'Hollywood. Il est beau, Almodovar en fait sa muse, son talent promet. Mais voilà, la quête de succès à tout prix lui fait enchaîner les mauvais choix. Cow-boy ridicule dans "Desperado", caricature de lui-même dans "Spy kids", l'acteur se perd dans une industrie cruelle avec ses acteurs. Son retour sur grand écran dans un tel rôle pourrait signer sa renaissance ou sceller la fin de sa carrière.

L'impact Versace

Qu'un biopic sur Versace ne se fasse qu'en 2016 est surprenant. Véritable icône de sa génération, Gianni Versace a ouvert les portes de la mode à la musique et au théâtre. Lorsqu'il crée sa maison en 1978, il se fait la promesse de ne jamais tomber dans l'ennui. Symbole du sexy et de l'exubérance, les critiques de mode le décrivait en une phrase : "Là où Armani habille la femme, Versace habille la maîtresse". Son moment de gloire portera le nom d'Elizabeth Hurley. Lorsque l'actrice arrive à une avant-première en robe noire Versace dévoilant ses courbes et retenue par plusieurs épingles, la célébrité du créateur dépasse le monde fermé de la mode.

Innovateur, lui seul comprend l'importance des célébrités au front row des défilés et des mannequins stars sur les podiums, faisant de Naomi Campbell sa muse. De même, il allie musique et mode en créant tenues de scènes pour Tina Turner et Elton John, entre autres. Son impact culturel est tel que les rappeurs l'adoubent. Tupac d'abord, Jay-Z ensuite.

Son assassinat en 1997 donnera naissance à des théories stupéfiantes dont la proportion n'égale que sa notoriété. Mafia, règlement de comptes, Andrew Cunanan entrera dans le panthéon des assassins les plus connus de l'Histoire.

Donatella, muse de Gianni

"Le jour où je déciderai de me marier, je me chercherai une Donatella."

La relation qui liait les deux âmes créatives de la maison Versace allait bien au-delà du lien fraternel. Gianni est à l'origine du blond platine de sa soeur et lui a fait découvrir la mode. Elle était son double. Tête créative de l'empire suite au meurtre de son frère, Donatella a surmonté un passage de relais difficile, entre manque de crédibilité et addiction à la cocaïne. Elle dira de cette épreuve : "pendant longtemps, j'ai pensé que j'avais hérité de l'empire Versace, pas grâce à mon talent, mais parce que Gianni était mort. J'ai essayé de m'approprier son style sans grand succès." Le hasard a voulu que son succès soit incarné par une star, comme son frère avant elle. La robe de Jennifer Lopez lors des Grammys en 2000 signe le retour en grâce de la maison Versace. Ce n'est donc pas la vie d'une seule icône que Bille Auguste devra raconter mais celle de deux poids lourds de la mode. Aucune actrice n'a encore été annoncé dans le rôle de Donatella. Qui pour incarner la superbe et la flamboyance de la créatrice ?

Audrey Likound