Incontournable lorsqu'il s'agit de se maquiller, le mascara est dans tout vanity qui se respecte. Mais à bien regarder le nom de la plupart des références de nos marques favorites, un détail nous interpelle : ils sont souvent affublés d'un sobriquet qui fait ouvertement référence au sexe. Un élément légèrement problématique qui nous a fait nous poser un certain nombre de questions.
Il suffit d'un rapide tour d'horizon pour s'apercevoir que le champ lexical du sexe est particulièrement répandu du côté des mascaras (et plus largement du maquillage). Le "Better Than Sex" de Too Faced, le "Bad Gal" de Benefit, le "Haute & Naughty" de MAC, le "Perversion" d'Urban Decay ou encore le "Climax Mascara" de Nars, témoignent de l'imagination débordante (mais pas vraiment de l'originalité) des créateurs lorsqu'il s'agit de nommer un produit aussi anodin qu'un mascara.
Mais si l'argument de la stratégie marketing peut vite être avancé, qu'est-ce que cela dit de la sphère de la beauté et de l'image des femmes ?
La libération sexuelle jusqu'au bout des cils ?
Oui, en 2018, ce ne sont plus les hommes qui ont à faire le premier pas et les femmes ont tout autant le droit de draguer et d'exprimer leur désir sexuel, sans pour autant subir le "slut-shaming" (une idée qui est encore en "process", on vous l'accorde). La parole se libère en ce qui concerne l'orgasme féminin et c'est nécessaire. Mais cela doit-il également passer par nos mascaras ? Pas sûr.
Tandis que Too Faced nous propose une expérience bien meilleure que le sexe, qu'Urban Decay entend nous pervertir (ou pervertir celui ou celle qu'on voudrait séduire) et que Nars veut nous faire atteindre le septième ciel, il faut rappeler qu'on ne parle QUE de make-up. Et, personnellement, je n'ai jamais atteint l'orgasme en appliquant mon mascara. Aurais-je raté quelque chose ?
Si le mascara a certes le don d'agrandir et de souligner le regard, pourtant, ce n'est pas là que réside le potentiel sexy de chacune. Et heureusement.
Le fait de donner un nom à connotation sexuelle à un mascara - pure stratégie marketing - n'est pas sans rappeler ces pubs qui, depuis des lustres, montrent une image hyper sexualisée de la femme pour faire vendre à peu près n'importe quoi. Coucou à ces femmes qui semblent avoir un orgasme dans leur douche à la simple odeur d'un gel douche miracle.
Ne faut-il pas également penser aux jeunes filles qui, elles aussi, sont des consommatrices de ces mascaras et semblent d'ores et déjà sexualisées ? Sans parler des échanges étranges que cela peut engendrer - et cela peu importe l'âge - lorsqu'une personne proche ou extérieure vous demande la référence du mascara que vous portez. On vous laisse imaginer.
Certes, le maquillage est un outil d'expression à part entière. Mais en affublant les produits de tels noms, ne réduit-on pas le fait d'être sexy au seul fait d'être maquillée ? Un détail qui enferme encore les femmes dans certaines injonctions ?
Et celles qui ne veulent plus se maquiller alors ?
En 2018, surtout, les femmes se battent pour se libérer des injonctions. Nombreuses sont celles qui optent pour le no make-up de manière militante, refusant l'injonction faite aux femmes à être belle et sexy. Ces dernières, qui déjà par leur démarche marchent à contre-courant, devraient-elles en plus comprendre qu'elles ne peuvent pas être séduisante sans mascara ?
Autant dire que de tels noms ne font qu'entretenir l'idée que le maquillage est indispensable aux femmes pour être désirables et pour arriver à séduire. Car, qu'on se le dise, l'évolution passe aussi par les tout petits détails.
Sachez pourtant que, n'en déplaise à certain.e, même les femmes qui ne se maquillent pas prennent leur pied. True Story.
Héloïse Famié-Galtier
